Mardi 26 juin 2018 c’est avec immense honneur que j’ai reçu les insignes de l’ordre du Soleil Levant, Étoile d’Or et d’Argent dont m’a honoré le Gouvernement du Japon.
Monsieur l’Ambassadeur,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Présidentes et Présidents (il y a toujours des présidents de quelque chose)
Chers amis,
C’est un grand honneur pour moi d’être reçu ce soir pour partager avec vous, cette remise des insignes de l’ordre du Soleil Levant, Étoile d’Or et d’Argent, dont m’honore le Gouvernement du Japon.
Avant tout, permettez-moi, Monsieur l’Ambassadeur, de vous remercier pour cette réception dans votre Résidence au cours d’une cérémonie certes protocolaire, mais chaleureuse et amicale.
Je reçois cette distinction avec beaucoup d’humilité, car je sais que ce sont les relations franco-japonaises, et plus particulièrement nos relations parlementaires qui sont honorées. C’est d’ailleurs ce que j’ai tenu à dire à M. Taro Kono, ministre des affaires étrangères du Japon et Mme Akiko Santo, présidente du groupe d’amitié Japon- France de la chambre des Conseillers, dans mes courriers de remerciement. Aussi, ai-je souhaité associer les membres du groupe d’amitié France-Japon du Sénat à cette remise et je remercie celles et ceux qui ont pu se libérer pour être présents ce soir. Je veux remercier tout particulièrement celui qui m’a donné le goût de cette responsabilité, mon prédécesseur à la tête du groupe d’amitié, Jacques Valade, ancien ministre successeur d’Alain Devaquet, amoureux et connaisseur du Japon comme peu de français. Je tiens à saluer cet homme de culture, universitaire, qui, malgré nos fortes oppositions politiques passées et présentes, m’a aussi accueilli, comme Président de la commission culture du Sénat, avec élégance et respect, dès ma première élection en 2004. Il incarne ici une continuité, qui vient de loin, puisque l’intérêt du Sénat pour le Japon est ancien. En effet, le groupe d’amitié France-Japon, créé en 1960, a désormais 58 ans d’existence.
Je note également, Monsieur l’Ambassadeur, que notre pays est tout aussi attaché que le vôtre aux relations qui unissent nos deux pays et nos deux parlements. Ainsi, notre collègue François de Rugy, Président de l’Assemblée nationale a remis, lors de son déplacement officiel au Japon au début du mois de juin, les insignes d’officier de la Légion d’honneur à M. Nobuteru Ishihara, président du groupe d’amitié Japon-France de la Chambre des représentants japonaise.
Membre du groupe d’amitié France-Japon depuis mon élection au Sénat en 2004, et président du groupe, cette distinction m’est dotant plus précieuse qu’elle évoque l’attachement et l’intérêt que je porte aux échanges entre la France et le Japon.
Les coopérations entre nos deux pays sont très nombreuses. Certes, les plus connues sont d’abord économiques. La Japon est ainsi le deuxième partenaire commercial de la région Asie-Pacifique de la France et près de 400 entreprises françaises y sont implantées, représentant 44 000 emplois. La France, pour sa part, accueille plus de 450 entreprises japonaises, et le Japon fait partie des dix premiers investisseurs.
En tant que membre de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, je suis surtout très attaché aux liens culturels qui nous unissent. Lors de nos derniers déplacements du groupe au Japon, c’est la culture qui a été au coeur de nos rencontres. En avril 2014, nous avions longuement échangé avec le président du Studios TOEÏ et avec celui de la télévision publique NHK sur les problématiques qui se posent aujourd’hui dans le domaine audiovisuel et cinématographique du fait de la révolution numérique. Nous avions aussi rencontré de nombreux réalisateurs japonais de toutes générations. Avec plus de 50 films distribués chaque année et de grands succès, le cinéma français figure en bonne place au Japon comme l’illustre en ce moment le fameux festival du film français d’Okohama, qui démontre qu’au delà d’Alain Delon, Truffaud et Godard, les japonais continuent d’apprécier les nouvelles générations du cinéma français. Il en est de même pour le cinéma japonais en France.
Je me réjouis ainsi, que le 160 ème anniversaire des relations diplomatiques entre la France et le Japon soit mis sous le signe de la culture, autour du thème « Japonisme 2018 : les âmes en résonance ». Dans ce cadre, ce sont une soixantaine d’expositions qui sont prévues, ainsi que des représentations, des spectacles et des évènements autour de l’art de vivre. Ames en résonance : plus qu’une thématique, c’est une expression, une illustration, un condensé, de ce qu’est la culture pour la fraternité humaine, pour nos relations et notre amitié.
D’ailleurs, la protection et la promotion de notre art de vivre était l’un des grands axes de l’accueil d’une délégation du groupe d’amitié Japon-France en mai 2016. Les échanges ont porté sur la nécessité de transmettre le patrimoine vivant que constitue la gastronomie nationale. Nous avons évoqué les mesures nécessaires en matière d’éducation, de recherche scientifique et universitaire, ou encore les actions envers le grand public. La France et le Japon ont d’ailleurs réalisé, dans le cadre de l’UNESCO, un inventaire de leur patrimoine culinaire. Pour chacun de nos pays, un aspect de ce savoir-faire culinaire a été inscrit au patrimoine immatériel de l’UNESCO : le « repas gastronomique des Français » et le « washoku », plus qu’une tradition culinaire des Japonais, c’est une pratique sociale basée sur un ensemble de savoir-faire, de connaissances, de pratiques et de traditions liées à la production, au traitement, à la préparation et à la consommations d’aliments, associé à un principe fondamental de respect de nia nature étroitement lié à l’utilisation durable des ressources naturelles.
Nous avons également échangé sur le système des labels et des appellations, permettant notamment de protéger les producteurs contre les fraudes à l’origine ou à la qualité. Le Japon venait en effet de se doter d’une loi sur les indicateurs géographiques.
La coopération entre nos deux pays est profonde. Nous l’avons tous vu lors de la très forte mobilisation, à tous les niveaux – collectivités territoriales, société civile, entreprises, autorités politiques -, à la suite du tsunami et de la catastrophe nucléaire qui en a résulté en mars 2012. Afin de manifester sa solidarité envers les victimes, j’avais tenu, lors du déplacement du groupe d’amitié en 2014, symboliquement à déposer une gerbe de fleurs à Ishinomaki, ville qui a été spécialement touchée par le séisme, en présence du maire, M. Hiroshi Kameyama, ainsi qu’à me rendre dans la Centrale de Fukushima, et à m’adresser aux salariés du centre de crise, pour saluer leur courage remarquable. Nous avions pu mesurer l’ampleur de la catastrophe et les difficultés auxquelles les 3.000 travailleurs du site étaient confrontés chaque jour.
J’en garde un souvenir grave, qui m’a fait ressentir comme jamais la responsabilité que nous devons avoir vis à vis de notre planète.
De même, et il me paraît essentiel de le redire, la France a été très touchée par les messages de solidarité et d’aide du Japon, à la suite des attentats qui ont si durement frappés notre pays. J’avais tenu de même au cours de notre visite en septembre 2010 à me rendre à Nagasaki pour y déposer, ce que fut je crois, la première gerbe de la République française et d’un pays allié de la 2ème guerre mondiale, en mémoire des très nombreuses victimes civiles de la bombe atomique. J’ai pu mesurer l’ampleur destructrice, et dévastatrice de cette arme qui je l’espère ne sera plus jamais utilisée.
De même que votre prédécesseur avait rendu un vibrant hommage aux victimes du terrorisme le 16 décembre 2015 à l’occasion d’une réception ici-même.
Au-delà des épreuves et des larmes, nos relations sont aussi fondées, et se renforcent, grâce à de grands moments de joie et de communion universelles. Ainsi, pour les six prochaines années, le sport sera le trait d’union entre nos deux pays et prolongera les liens d’amitié mis en avant à l’occasion du 160 ème anniversaire des relations diplomatiques entre nos deux pays.
La France succédera en 2023 au Japon pour l’organisation de la coupe du monde de Rugby, qui s’y déroulera l’année prochaine. A cet égard, je ne peux que noter la montée en puissance de votre équipe nationale, les « Brave Blossoms », qui avait impressionné par la qualité de son jeu en novembre 2017, tenant en échec notre quinze de France sur un score final de 23 à 23. Cette coupe du monde de rugby, première du genre à être organisée en Asie, ne devrait pas manquer de rapprocher encore un peu plus le Japon et la France.
Puis, en 2020, Tokyo transmettra la flamme olympique à Paris, pour l’organisation des jeux olympiques et paralympiques de 2024. Le Sénat a organisé en septembre 2016 un colloque permettant un échange d’expériences entre nos deux pays sur les héritages et les atouts que peuvent apporter de grands évènements sportifs à la société et aux territoires. Vous aviez souligné, Monsieur l’Ambassadeur, que ce colloque fournissait une occasion significative à tous ceux qui s’engagent dans les événements sportifs au Japon ou en France d’approfondir leur discussion sur la valeur de tels événements pour le renforcement d’un partenariat public-privé et la dynamisation des territoires. Vous aviez également indiqué qu’il serait formidable pour les relations d’amitié franco-japonaises que Tokyo puisse passer le relai olympique à Paris. Ce souhait s’est réalisé quelques semaines plus tard. La pratique sportive porte des enjeux d’éducation, de mixité sociale, d’inclusion, des sujets liés à la place des familles dans les villes ou à l’intégration par le sport.
Les grands événements sportifs, sont capables de « réduire le temps de la politique publique » et de transformer le territoire et sa société en sept ans. Les Jeux olympiques de Tokyo de 1964 avaient transformé votre pays, montrant au monde qu’il s’était relevé de la guerre. L’ambition de Tokyo 2020 est de proposer les Jeux les plus innovants, avec pour mot d’ordre « découvrir demain ». Nous sommes ainsi impatients de découvrir les innovations que votre pays va dévoiler à cette occasion.
Tokyo et Paris sont ainsi liées par les Jeux olympiques et paralympiques. A l’occasion de la visite en octobre dernier de la Gouverneure de Tokyo, Paris et Tokyo ont signé un communiqué conjoint témoignant de la volonté de ces deux villes d’approfondir leurs échanges et leur coopération dans de nombreux domaines, dépassant les Jeux, comme le tourisme, la culture ou l’environnement.
C’est pour moi l’occasion de saluer les coopérations décentralisées entre la France et le Japon. Aujourd’hui, 53 villes, départements ou régions des deux pays sont liées par des jumelages ou des conventions et près de 75 projets de coopération décentralisés associent nos collectivités territoriales. Ils permettent de traiter de sujets concrets d’intérêt commun, tels que les transports, l’environnement, l’aménagement urbain, ou de renforcer des liens universitaires. Lors des dernières rencontres franco-japonaises de la coopération décentralisée à Tours en octobre 2016, co-organisées par Cités Unies France et le bureau parisien du centre japonais des collectivités locales, 22 collectivités françaises et 19 collectivités japonaises étaient présentes démontrant la vitalité des projets portées par les collectivités de nos deux pays. Le Sénat, en tant que représentant des collectivités territoriales se félicite de ce dynamisme. Les prochaines rencontres auront lieu en octobre à Kumamoto. J’avais d’ailleurs eu l’occasion d’échanger avec le maire de cette ville – organisatrice de la prochaine coupe du monde de handball – , à l’occasion du colloque organisé au Sénat sur les grands évènements sportifs.
Monsieur l’Ambassadeur, Mesdames et Messieurs les sénateurs, chers amis, vous le voyez, les relations franco-japonaises sont vives et le groupe interparlementaire d’amitié y contribue. Le déplacement prochain d’une délégation du groupe d’amitié France-Japon du Sénat sera l’occasion de réaffirmer nos liens et de renforcer nos échanges.
La distinction que je reçois de vos mains, Monsieur l’Ambassadeur, est un magnifique symbole. Je souhaite qu’elle soit le signe d’échanges renforcés entre nos deux pays et nos deux parlements.
Seul le prononcé fait foi.