L’article 10 de la Loi stipule : « L’État organise, à sa charge, dans le cadre du service public de l’enseignement et afin de contribuer à ses missions, un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance, qui a pour mission de :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements d’enseignement des services numériques permettant de diversifier les modalités d’enseignement, de prolonger l’offre des enseignements qui y sont dispensés, de contribuer à l’innovation des pratiques et aux expérimentations pédagogiques favorisant la coopération, et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques pour leur enseignement, des contenus et services contribuant à leur formation initiale et continue ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

« 3° Assurer l’instruction des enfants qui ne peuvent être scolarisés dans une école ou dans un établissement scolaire ;

« 4° Apporter son soutien au développement de projets innovants favorisant les usages pédagogiques du numérique à l’école.

« Ce service public utilise en priorité des logiciels libres et des formats ouverts de documents. »

Voici le texte de mon intervention sur cet article:

L’article 10 aborde plusieurs sujets précis. Toutefois, je pense que son objet n’est pas d’apporter des améliorations ou des réponses concernant quelques problèmes précis. On est dans la décision, dans l’installation de ce qui représente une révolution pour l’éducation nationale. D’ailleurs, comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, cela explique en grande partie que l’on puisse parler de loi de refondation.

Le dispositif, tel qu’il résulte de cet article, est-il figé ? Je pense qu’il est impossible de rentrer dans le débat à partir d’une telle vision, car c’est une révolution qui est en cours. Les bouleversements qui s’ensuivent vont conduire le ministère de l’éducation nationale – je l’espère, je le sais – à porter un regard suffisamment attentif sur la mise en œuvre de ce dispositif pour connaître, lui-même, une profonde évolution.

Je pense que nous devons appréhender le sujet de cette façon. Aborder le problème sous le seul angle de la mise à contribution des collectivités territoriale serait réducteur pour le Sénat. Nous autres, sénateurs, devrions considérer, au contraire, que les collectivités ont jusqu’à présent assumé une charge en termes de matériels et de supports qui n’a pas produit, sur le terrain et dans l’éducation, la plénitude des effets escomptés.

En effet, l’État n’a pas fait ce qui était nécessaire pour que ces matériels soient utilisés : la formation, la fourniture des contenus pédagogiques et la mise en place d’une vision collaborative.

C’est pourquoi nous parvenons à un taux d’utilisation réelle de ces matériels de 5 %. Le problème n’est donc pas, pour les collectivités territoriales, de redouter qu’on leur en demande plus, mais que leurs investissements servent enfin à quelque chose ! Des maires m’ont confié qu’ils ont acheté des ordinateurs pour tout le monde mais, de fait, les matériels restent dans les placards, faute de professeurs formés à leur utilisation !

Je ne comprends donc pas que l’on prenne le problème par ce bout-là.

Aujourd’hui, à la lecture de cet article, on devrait se réjouir de ce que l’État, assumant son rôle en termes de formation, fasse enfin en sorte que l’investissement des collectivités territoriales réalise tout son potentiel.

On peut, comme Mme Gonthier-Maurin s’exprimant sur le CNED, dire qu’il faut veiller à ce que chaque organisme existant ne soit pas dépouillé ni affaibli, et soit au contraire conforté. Mais l’on peut tout aussi bien se dire – puisqu’il s’agit d’une révolution – que chacune de ces institutions va évoluer.

Nous avons fait un voyage d’étude au Canada, sous la direction de M. Legendre. On nous a montré les innovations pédagogiques en cours et je me souviens bien – cela m’avait marqué – qu’auprès d’un public très défavorisé, constitué de jeunes qui n’avaient pas de parents pour l’aide au devoir le soir, le numérique était devenu un outil pour le soutien scolaire et, au-delà, contre les inégalités sociales. Certains ont auprès d’eux leurs parents le soir, d’autres pas, et c’est là que le numérique peut intervenir.

Dans ce que nous avons vu, l’informatique et le numérique permettaient le suivi personnalisé d’un élève par un professeur via un ordinateur, et de façon interactive et collaborative, c’est-à-dire qu’il ne s’agissait pas simplement de corriger un devoir et de le renvoyer, mais d’engager, le cas échéant, une véritable discussion.

Donc, la vision de l’enseignement à distance doit être élargie, bien au-delà de ce qu’il peut apporter, par exemple, aux personnes en situation de handicap. Ce qui est proposé dans cette loi permet, en effet, d’aller beaucoup plus loin.

J’en termine donc en affirmant avec force que l’État s’engage enfin, avec cet article, à placer le numérique au cœur de l’enseignement. C’est là une révolution, et une refondation