Vous pouvez retrouver ci-dessous mes observations et questions,  faisant suite à l’intervention du président du CSA, le mardi 29 avril 2013:

Ce rapport dense démontre l’importance de l’activité du CSA et propose une réforme, de nouvelles règles pour la régulation de l’audiovisuel ; vous soulignez le caractère inédit de propositions d’une telle ampleur, en précisant que vous utilisez-là une faculté que la loi reconnaît au CSA. Si vous êtes certainement dans votre rôle à le faire, il ne faudrait pas que vos propositions législatives et réglementaires, par leur nombre et leur détail, en viennent à changer le dialogue avec le Parlement, à laisser penser aux parlementaires que vous les déposséderiez de leur rôle – ce d’autant que vos propositions avaient déjà cours dans notre débat sur la loi de novembre dernier et que nous avons décidé d’en reporter l’initiative à un cadre plus idoine, celui de la loi sur la création, que nous pourrions examiner à l’automne.

Cette remarque, empreinte de critique, ne vaut que pour la forme. Sur le fond, les extensions de compétences que vous proposez pour le CSA me paraissent largement justifiées, elles prolongent celles que la loi vous a récemment reconnues. L’extension de la régulation aux distributeurs, en particulier, est nécessaire : à l’ère du numérique, qui a bouleversé les modes de production et de consommation des images, des contenus, on ne saurait continuer d’asseoir la régulation sur des règles définies pour l’hertzien, qui laissent en dehors de son champ un nombre très important et grandissant de l’audiovisuel contemporain.

Cela dit, je reste en attente d’une analyse approfondie – que le CSA livrerait utilement – de l’évolution du paysage audiovisuel dans cinq ou dix ans. Vous nous proposez de rattraper notre retard législatif et réglementaire sur l’évolution des techniques, mais ne prendrons-nous pas encore du retard, si nous n’anticipons pas ? Nous avons besoin de votre expertise, de votre vision de ce que sera l’audiovisuel dans une décennie, pour nous aider à non pas seulement combler notre retard, mais à éviter d’en prendre encore.

Enfin, je suis en désaccord sur votre proposition d’attribuer au CSA un pouvoir de régulation ex ante du marché de la télévision, des SMAD et de la distribution. Si le CSA est dans son rôle en analysant ce marché, en menant à bien une veille anti-dumping, il n’a pas à émettre de directive sur le marché audiovisuel : c’est à l’Autorité de la concurrence de le faire, rien ne justifie un pouvoir spécifique du régulateur sur ce secteur ouvert, par contraste avec celui des transports ou de l’énergie, par exemple.

Je suis favorable à une régulation de la diffusion audiovisuelle sur Internet – les règles de droit existent et il s’agit de les appliquer – et non pas, comme on a entendu dire, de confier le réseau à Big Brother… Dans les règles actuelles, cependant, si certains domaines paraissent suffisamment balisés, d’autres contiennent des zones d’incertitudes, laissent une grande marge d’interprétation, je pense par exemple à l’affaire Dieudonné – et c’est ici, aussi, qu’on attend du CSA qu’il donne son analyse, voire qu’il fasse des rappels à l’ordre quand il l’estime nécessaire.

Deux questions, maintenant.

Où en est la mission sur la concentration dans la radio ? Pourquoi son rapport, annoncé pour janvier, est-il en retard ? En décembre dernier, vous avez changé la méthode de calcul, ce qui a relevé de facto le plafond de la concentration ; je m’en suis alerté, c’est un problème pour bien des radios indépendantes, elles vous ont posé des questions auxquelles vous n’avez pas répondu : est-ce parce que ces questions n’ont pas lieu d’être ? Nous serons très attentifs à vos réponses, parce que cette question de la concentration est très sensible et parce que nous tenons aux radios indépendantes.

Quels sont, ensuite, les différents modèles de régulation en Europe, au-delà de celui que nous connaissons bien ? Vous présidez un groupe de réflexion entre régulateurs européens : quelles sont les lignes communes, les meilleures voies pour une régulation concordante à l’échelle du continent ?

Vous aurez compris le sens de mon propos : merci pour votre travail important, nous tenons à un CSA indépendant et actif – mais également à ce que le Parlement garde la pleine initiative de la loi.