SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

COMMISSION MIXTE PARITAIRE

séance publique le 3 novembre 2009

Discussion de l’Article 2 de la loi sur l’Organisation et régulation des transports ferroviaires et guidés

Monsieur le président, je m’étais inscrit pour prendre la parole sur l’article 2 bis A, mais je n’ai pas pu être présent au moment de la discussion de cet article. Toutefois, mon propos est valable pour l’ensemble des articles de ce projet de loi.

Monsieur le secrétaire d’État, ce que j’ai à dire, je l’aurais dit avec plus de force encore à M. de Raincourt, s’il était resté.

Il est possible de juger du fond d’un texte en examinant la méthode employée et la forme utilisée. Cet amendement de plusieurs pages, présenté par le Gouvernement à l’Assemblée nationale après le débat au Sénat, est l’un de ces camouflets qui sont si souvent infligés à notre assemblée. Ici, le débat parlementaire est mené dans l’urgence, en catimini, et à la baguette. Parfois, les sénateurs, quelle que soit leur appartenance politique, réagissent et se révoltent. Le Gouvernement a dû se dire que tel ne serait pas le cas avec cet amendement, puisqu’il ne traite que de l’Île-de-France et ne concerne donc pas toutes les collectivités.

Quoi qu’il en soit, il est inadmissible pour tous les élus qu’un amendement concernant les collectivités de l’Île-de-France n’ait pas été discuté au Sénat, assemblée qui est censée représenter les territoires et où les textes relatifs aux collectivités territoriales doivent d’abord être examinés. En l’occurrence, la Haute Assemblée est juste bonne à dire « amen » alors que cet amendement change beaucoup de choses !

Monsieur Apparu, le terme que vous avez utilisé tout à l’heure était absolument à contre emploi. Pour justifier cet amendement, vous avez parlé d’un échange entre la RATP et le STIF. Or, vous le savez bien, un échange entre deux partenaires suppose une discussion, puis un accord. Dans le cas présent, il s’agit non pas de donner quelque chose pour recevoir autre chose, mais d’imposer la volonté du Gouvernement.

Nous refusons cette méthode, qui nous laisse augurer de votre vision du Grand Paris. Avec ce gigantesque projet, qui pourrait pourtant être porteur d’avenir, on sait bien que Nicolas Sarkozy a une volonté de recentralisation. Il suffit de voir l’amendement qui a été adopté à la hussarde, de nuit, et qui permet à l’État de passer en force, sans débat avec les collectivités territoriales. Or le STIF, c’est d’abord la voix des collectivités territoriales en ce qui concerne le réseau de transport dans l’ensemble de l’Île-de-France. Nous reparlerons d’ailleurs de ces questions dans les jours, les semaines ou les mois à venir dans le débat sur La Poste, puis dans celui sur la réforme des collectivités territoriales.

Il y a ici même des élus locaux qui, indépendamment de leur appartenance politique, de gauche ou de droite, vous le disent : vous touchez au cœur de la décentralisation, au rôle même du Sénat et vous foulez aux pieds les collectivités. D’ailleurs, on le voit bien avec la suppression de la taxe professionnelle, dont certains s’émeuvent déjà. Car ce sont toutes les collectivités et pas seulement celles de gauche qui ne pourront plus faire face à leurs responsabilités et protéger les citoyens ! Une fois qu’elles auront assuré le minimum obligatoire, elles ne pourront plus, contrairement à aujourd’hui, financer les associations culturelles ou les clubs sportifs ; elles seront étouffées.

Il est bien que le Sénat puisse mettre le holà à ces abus. C’est pourquoi je souscris totalement aux propos qui ont été tenus par certains de mes collègues. Ils ne sont aucunement outranciers. En effet, on ne peut pas continuer à marcher de cette façon sur la région d’Île-de-France ! On ne peut pas continuer à marcher sur la Ville de Paris ! On ne peut pas continuer à marcher sur les collectivités territoriales ! On ne peut pas continuer à marcher sur tous ces élus qui se battent chaque jour pour qu’on respecte la vie de nos concitoyens franciliens !

Cet amendement donne le ton de ce qu’est l’ensemble du projet de loi : encore une fois, on affaiblit le service public, on affaiblit les territoires, et tout cela au nom de la réforme. Pourtant, nous voulons des réformes, nous sommes pour la modernisation. Malheureusement, les vôtres aboutissent chaque fois à une régression à tel point que, dans ce pays, qui a toujours été avide de progrès, vous commencez à installer dans les têtes de nos concitoyens que réforme veut dire régression.