Par LIBÉRATION.FR le 09/06/2010

Non-cumul: la concession d’Aubry aux sénateurs PS

La première secrétaire a fait voter le principe, hier mardi en conseil national, tout en accordant un an supplémentaire aux sénateurs réélus en septembre 2011 pour respecter la règle.

La première secrétaire du PS, Martine Aubry avec le chef de file des sénateurs socialistes,

La première secrétaire du PS, Martine Aubry avec le chef de file des sénateurs socialistes, Jean-Pierre Bel, le 25 mai à Paris. (AFP/FRED DUFOUR)

«Pour une grande réforme», s’accommode un membre de la direction. Alors qu’un bras de fer était attendu, hier mardi, en conseil national («parlement») du PS sur la houleuse question du non-cumul des mandats, sénateurs socialistes et Solférino ont topé là, peu avant le début du rendez-vous, pour l’octroi d’un sursis supplémentaire aux cumulards. Jusqu’alors inflexible sur l’une des principes phares, avec les primaires, du programme de rénovation du parti, la première secrétaire a donc fini par lâcher du lest. A la grande satisfaction du groupe PS du Sénat, convaincu qu’une application immédiate du non-cumul compromettrait leurs chances de victoires au sénatoriales de 2011. Mais au risque de frustrer les militants qui avaient plébiscité cette mesure.

Soucieuse d’apaiser les tensions alors que les sénateurs PS avaient – ultime mouvement d’humeur – voté à l’unanimité, dans la matinée de mardi, pour un non-cumul «applicable en 2014», Aubry a dit avoir «écouté, entendu» les réclamations. Et ajoute avoir été «sensible aux situations de certains sénateurs qui [lui] ont fait part de leurs difficultés à choisir leur successeur à la tête d’un exécutif dans les délais prévus».

Pour permettre à tout cumulard de lâcher en douceur l’un de ses mandats, la proposition du sénateur David Assouline a donc été retenue: fixer aux sénateurs la même date butoir que les députés pour appliquer le non-cumul. Ceux qui sont renouvelables en septembre 2011 pourront alors se représenter sans avoir à sacrifier immédiatement un mandat local et pourront rester à la tête de leur exécutif jusqu’en septembre 2012. «Cela permet d’harmoniser la situation de l’ensemble des parlementaires», justifie Aubry qui s’engage aussi à faire voter, en cas de victoire en 2012, une «loi sur le non-cumul» des mandats et son «corollaire indispensable» sur le statut de l’élu».

«Solution de sagesse» ou cadeau aux «barons»?

«Il faut des transitions. Des successions, ça se prépare, ce qui est parfaitement compréhensible», entonne Benoît Hamon, porte-parole du PS sur Europe 1, récusant tout recul sur le non-cumul: «Il y a des débats, on dégage et on fabrique des compromis et des consensus et on parvient à la fin à cette mesure.»

Ce mercredi matin, le chef de file des sénateurs PS, Jean-Pierre Bel, qui mettait en garde voilà trois semaines dans Libération, contre le risque de se «tirer une balle dans le pied», applaudit à la concession de la première secrétaire. «Nous, nous pensions qu’il ne fallait pas affaiblir la gauche (..) alors que nous avons peut-être une chance de mettre historiquement fin à 50 ans d’hégémonie de la droite au Sénat», rappelle-t-il sur LCI, saluant une «solution de sagesse». Sur la même ligne, l’ex-numéro un du PS parle d’un «recul intelligent».

Le calendrier arrêté laisse, en revanche, Jack Lang sur sa faim: «Martine a ouvert une voie», mais «je me demande si hier soir les barons de diverses sortes n’ont pas eu en partie raison» et «n’ont pas réussi à vaincre la volonté des militants, et c’est un peu regrettable», a commenté l’ancien ministre sur France 2. Ceux-là se prononceront par un vote, le 24 juin prochain.