M. David ASSOULINE. – Monsieur le Préfet, comme vous le savez, à l’occasion d’une manifestation pacifique d’Algériens en France le 17 octobre 1961, une répression sanglante s’abattit sur nombre d’entre eux, sous la direction et les ordres du Préfet d’alors, Maurice Papon, de sinistre mémoire.

Il y a 11 ans, le Conseil de Paris et le Maire de Paris, Bertrand DELANOË, ont décidé d’apposer une plaque commémorative rappelant ces dizaines de morts à la mémoire de notre Capitale.

Il fut imité dans de nombreuses villes de France, en particulier en banlieue, marquée par ces événements, au moment du cinquantième anniversaire l’année dernière.

Pourtant, outre le communiqué officiel d’alors, le lendemain de cette répression sanglante, faisant état de deux morts, jamais une parole officielle de l’Etat n’est venu reconnaître ce qui, aujourd’hui, est une évidence établie par l’ensemble des historiens travaillant sur cette période, qui ne divergent que sur le nombre exact des victimes, mais qui, pendant quelques décennies, a été occultée, masquée, et souvent avec acharnement.

Celles et ceux qui demandent cette reconnaissance ne sont animés d’aucun désir de vengeance, n’appellent nullement à la repentance ; ils veulent simplement, comme nous-mêmes, la vérité! Bien sûr, certains veulent toujours instrumentaliser l’Histoire pour enfermer chacun dans de fausses identités et de vraies haines.

Pour les en empêcher et pour la vérité, pour notre part, nous vous demandons aujourd’hui que le silence qui entretient les blessures soit rompu, d’ailleurs comme pour les harkis, et nous sommes convaincus que cela sera ressenti profondément comme un acte de paix tourné vers l’avenir. Cette reconnaissance démontrera la force de notre République et de ses valeurs, et un encouragement pour tous les démocrates qui veulent que plus jamais dans notre démocratie, pour quelque raison que ce soit, on puisse, au faciès, taper à mort, tirer à vue et noyer des manifestants pacifiques.

Monsieur le Préfet, cette parole, cette reconnaissance par l’Etat viendra-t-elle enfin ?