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SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011
Projet de Loi portant sur la réforme des retraites
séance publique le 07 octobre 2010
Discussion générale

Nous allons certes continuer à discuter du fond de cette réforme, mais permettez-moi de m’attarder de manière un peu solennelle sur la forme, et ce par respect pour notre fonction, qui est la même, que l’on appartienne à la majorité ou à l’opposition.

On voudrait nous habituer à certaines pratiques, mais je rappelle aux plus anciens d’entre nous – moi, je ne siège dans cette enceinte que depuis quelques années – qu’il n’est pas normal, dans une démocratie parlementaire, d’apprendre un matin, à dix heures cinq, en plein débat, au travers d’une dépêche de l’AFP en provenance de l’Élysée, et alors que le Parlement est en session plénière, alors que la commission saisie au fond a travaillé sur ce projet de loi et que nos concitoyens sont, eu égard à l’importance de la réforme, plus attentifs encore à nos débats, que Nicolas Sarkozy a demandé que soient déposés deux amendements, l’un en faveur des mères de trois enfants ou plus, l’autre en faveur des mères d’enfants handicapés ! Cette information nous provient directement de l’Élysée, qui n’a même pas fait semblant de passer par d’autres canaux !

Un sénateur socialiste. Les ministères !

Et seulement quelques minutes plus tard, une seconde dépêche nous parvient ! Voilà une manière bien cavalière de traiter la représentation nationale ! M. Woerth est devant le Sénat pour discuter de ce projet de loi et c’est l’Élysée qui nous propose deux amendements !

C’est du jamais vu !

Mes chers collègues, consultez les annales du Parlement pour savoir si l’Élysée a jamais agi avec une telle outrance !

Sérieusement, ces mesures coûtent de l’argent. L’article 40 de la Constitution sera-t-il opposé à ces amendements comme il l’est chaque fois aux propositions que fait la gauche ?

La seconde dépêche de l’AFP en provenance de l’Élysée nous apprend que ces mesures seront financées par de nouvelles recettes à hauteur de 3,4 milliards d’euros, grâce à une augmentation de 0,2 % des prélèvements sociaux sur les revenus du capital et à un alignement du taux des prélèvements forfaitaires sur les plus-values immobilières sur celui des prélèvements applicables aux autres revenus du capital.

Les salariés qui se sont mobilisés ne manqueront pas d’entendre ce message, et nous les appelons vivement à l’entendre : puisque vous êtes parvenus à trouver 3,4 milliards d’euros, pourquoi donc ne serait-il pas possible de dégager des moyens supplémentaires en taxant les revenus du capital pour maintenir l’âge légal de la retraite à 60 ans ?

Certes, cette annonce procède d’une manœuvre, mais elle constitue aussi un encouragement.

Quand les Français manifestent, on trouve, en une nuit, 3,4 milliards d’euros ! C’est donc qu’il vous est possible de trouver plus encore pour des catégories autres que les mères de famille ou d’enfants handicapés, et ce par souci de justice ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur plusieurs travées du groupe CRC-SPG.)

Je pense notamment à tous les salariés ayant commencé à travailler à 18 ans, qui, bien qu’ils totalisent 41,5 annuités de cotisation, devront néanmoins travailler 44 ans, puisque vous leur « volez » la surcote dont ils auraient pu bénéficier ! Voici ce que nous voulons : le droit !

Par ailleurs, je veux dire à notre collègue Philippe Dallier qu’il n’est pas convenable de nous parler avec autant de violence !

Monsieur le président, j’ai été souvent interrompu ! Je resterai respectueux tant que l’on me respectera !

Monsieur Dallier, dans le débat relatif au Grand Paris, je vous ai entendu vous révolter quand l’exécutif niait la liberté des parlementaires.

Or, du fait de votre appartenance à la majorité, vous êtes plus écouté que nous, monsieur Dallier !

Pourtant, vous vous êtes révolté !

Aussi, nous appelons l’ensemble des sénateurs à refuser une telle situation et réclamons une suspension de séance, car il y va de l’honneur du Sénat !