Sénat – Session ordinaire 2011-2012

Questions d’actualité au gouvernement

Séance publique du 20 octobre 2011

 

Monsieur le Ministre,

Je suis pour l’instant déçu de la réponse que vous avez apporté à Madame Borvo Cohen-Seat. Car reconnaître officiellement des faits avérés, largement reconnus par les historiens, par la société civile, par des maires, qui, dans toute la France ont commémoré ce moment dramatique de notre histoire, devrait être une évidence.

Je vous l’assure, ce serait tellement important pour les victimes de cette tuerie en plein Paris un certain 17 octobre 1961, pour leurs enfants et petits-enfants, français, qui veulent se sentir bien dans leur pays, la France, et dans la République, à laquelle ils veulent croire pleinement.

Oui, Monsieur le Ministre, quelques mots pour seulement dire ce qui a été, et cela vaudrait reconnaissance officielle. Dites-les. Sortez de la froideur de la langue de bois qui se veut faussement celle d’une raison d’Etat, qui 50 ans après, a encore moins de raison d’être évoquée pour justifier le silence. Faites preuve de cette humanité, et de ce véritable sens de la République.

Depuis le bilan de ce fameux communiqué officiel le lendemain des faits il y a 50 ans : 2 morts, aucune parole officielle de notre République pour dire et reconnaître ce qui a été un massacre d’au moins plusieurs dizaines de manifestants algériens pacifiques, perpétré par des policiers de notre Etat démocratique, sur ordre du sinistre Maurice Papon alors préfet de Police de la Seine.

Pour nous, pour celles et ceux qui le demandent, il n’y a aucun sentiment de vengeance, aucune demande de repentance, nous voulons seulement et simplement la vérité. Bien sûr, il y aura toujours ceux qui instrumentalisent l’histoire pour enfermer chacun dans des fausses identités et des vrais haines,  au contraire nous vous demandons solennellement aujourd’hui de rompre le silence qui entretient les blessures, de prononcer des mots de fraternité, qui seront ressentis profondément comme un acte de paix tourné vers l’avenir.

Faites-le ici, au Sénat, où au milieu du silence quasi absolu de l’époque, Gaston Defferre, dont personne, ne pourra contester le sens de l’Etat et le respect de la police républicaine, évoqua les faits sous les invectives. Dites ces mots, et vous allumerez un espoir, dans tous les yeux et les consciences, qui les attendent : ceux de nos collègues sénatrices qui représentent la Nation Française, Samia Ghali, Bariza Khiari, Leila Aïchi, ceux des Samia ou Mehdi qui dans tous les quartiers se battent pour la République, ceux de tous les démocrates qui veulent que, plus jamais dans notre démocratie, et pour quelque raison que ce soit, on puisse, au faciès, taper à mort, tirer à vue, et noyer des manifestants pacifiques.