PARIS, 12 juin 2014 (AFP) – Les sénateurs ont adopté jeudi l’accord trouvé avec les députés sur une proposition de loi PS contre la concurrence sociale déloyale, visant notamment à renforcer les contrôles et les sanctions contre les entreprises ayant recours de manière abusive à des travailleurs détachés.
Les sénateurs ont voté à main levée en faveur de ce texte arrêté le 4 juin lors d’une commission mixte paritaire (CMP, 7 députés, 7 sénateurs). Il doit encore recevoir l’aval de l’Assemblée pour être adopté définitivement.
Comme en première lecture, l’accord a été adopté avec le soutien de l’ensemble de la gauche –PS, RDSE (à majorité PRG), écologistes, et CRC (communiste, républicain et citoyen)- et de l’UDI-UC. L’UMP a appelé à l’abstention.
La proposition de loi vise à traduire par anticipation en droit français le compromis survenu au niveau européen à propos du renforcement de la directive travailleurs détachés.
Cette directive de 1996 prévoit que le « noyau dur » des règles du pays d’accueil s’applique (salaires, conditions de travail…) lors du détachement d’un travailleur dans un pays de l’UE même si les cotisations sociales restent dues dans le pays d’origine.
Mais elle fait l’objet de fraudes croissantes de toutes sortes qui créent des cas de concurrence déloyale.
La proposition de loi instaure, comme dans l’accord européen, le principe de « responsabilité solidaire » qui permettra de poursuivre un donneur d’ordres pour des fraudes relevant d’un de ses sous-traitants ayant recours à des travailleurs détachés. Mais elle va au-delà, puisque la responsabilité solidaire couvrira non seulement le BTP mais aussi tous les autres secteurs fortement concernés par le détachement (agroalimentaire, transport, etc.), ce qui n’est que facultatif dans le compromis européen.
Le texte met aussi en place une liste noire sur internet, où pourront figurer pendant deux ans, sur décision du juge, les entreprises ayant été condamnées pour « travail illégal » à une amende. Il prévoyait que l’inscription à cette liste noire soit effective pour les amendes de plus de 15.000 euros. Mais un amendement sénatorial a supprimé ce seuil, ce qu’a validé la CMP.
Cette dernière est aussi revenue sur un autre amendement du groupe communiste au Sénat permettant au juge de demander le remboursement des aides publiques perçues les 5 années précédentes par une entreprise condamnée pour travail illégal. La CMP est revenue à la rédaction initiale de l’Assemblée qui prévoyait l’interdiction de nouvelles aides pendant cinq ans.
La CMP a par ailleurs retenu, comme le proposait le Sénat, un dispositif unique de solidarité financière, applicable au donneur d’ordre et au maître d’ouvrage, en cas de non-paiement du salaire minimum à un salarié d’un sous-traitant, qu’il soit détaché ou non.
Le ministre du Travail François Rebsamen s’est félicité notamment qu’au terme du processus législatif, « la loi (aille) au-delà de la responsabilité solidaire prévue par l’Europe », puisqu' »elle ne couvrira pas seulement le BTP, mais tous les autres secteurs concernés ».