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SÉNAT

SESSION EXTRA-ORDINAIRE DE 2008-2009

QUESTION D’ACTUALITE

séance publique le jeudi 17 septembre 2009 à 15h00


Monsieur Le Président,
Monsieur le Premier Ministre,
Mes chers Collègues,

 

Ecoutez ça :

« Une expertise est menée par une société indépendante. Sur 33 personnes, il en ressort que 13 ont des pensées « mortifères ». La direction nous a alors juré que ça n’avait rien à voir avec les reconversions. » C’était en 2006, c’est un employé de France Télécom en Ardèche, qui nous raconte les différentes reconversions imposées aux personnels depuis quelques années sur son site. Il poursuit : « ils ont recommencé en 2008, on nous demande à nouveau de changer de métier (…) Pour la troisième fois en 3 ans. Et impossible de refuser (…) D’autant qu’après la pression est constante. On nous compare avec les autres sites (…) On sait que deux ou trois sites vont fermer (…) Résultat il règne une concurrence permanente entre nous ». Et de conclure : « On se sent lâchés. On n’est plus rien, on est devenu des artisans du CAC 40. »

 

Ecoutez ça encore :

« On ne peut les expliquer (les suicides) avec les références habituelles de la psychiatrie. Il y a une bascule dans l’ordre social, dans le fonctionnement de la société, c’est aussi le signe d’une rupture dans la culture et la civilisation : les gens se tuent pour le travail » c’est Christophe Dejours (psychanalyste, membre de la commission Le Breton mise en place par votre gouvernement) qui parle.

Il poursuit :

« Les gestionnaires qui ne regardent que le résultat ne veulent pas savoir comment vous les obtenez… C’est comme ça que les salariés deviennent fou, parce qu’ils n’y arrivent pas. Les objectifs qu’on leur assigne sont incompatibles avec le temps dont ils disposent. »

« On prend les gens, on les casse, on les vire. L’être humain au fond est une variable d’ajustement, ce qui compte c’est l’argent, la gestion, les actionnaires, le conseil d’administration. »

 

23 collaborateurs de France Télécom se sont donnés la mort en 18 mois. Et souvenez-vous la série de suicides qui frappa le personnel du Technocentre de Renault à Guyancourt, et l’on parlait déjà de la pression constante à la rentabilité pesant sur le personnel.

 

Dans ce contexte, Monsieur le 1er Ministre, vous arrive-t-il de vous interroger sur la « politique de civilisation », sur la société, sur le mode de relations au travail, sur le type de management, que vous avez encouragés avec votre si cher slogan « travailler plus pour gagner plus ».

Franchement, ne voyez-vous pas les dégâts énormes causés par votre idéologie et vos actes, sur la qualité de la vie, du travail, des relations humaines, et de nos valeurs.

Oui, vos actes : libéralisation des heures supplémentaires, travail du dimanche, légalisation du prêt de main-d’oeuvre, détricotage du code du travail, soumission à la fameuse refondation sociale voulue par le MEDEF et que vous mettez en oeuvre en serviteurs zélés.

A l’heure où Le Président va encore nous parler dans les arènes mondiales du « nouveau capitalisme », qui ne fait qu’ajouter à l’ancien, celui des cadences infernales et du travail en miettes : la solitude, pensez-vous que le monde du travail recevra ses paroles autrement que comme des mots, toujours des maux ?